Palettes
Sylvie Fleury
À son origine, le mot poudrier désignait un godet à couvercle percé de trous, rempli de poudre destinée à sécher l’écriture. Il disparaît avec l’usage du papier buvard, avant de se réinventer en accessoire de mode.
Avant la Révolution, la poudre est l’apanage des aristocrates et des bourgeois. Les pratiques changent peu au XIXe siècle : la mode reste au teint blanchâtre et l’acte de se poudrer se fait dans l’intimité du cabinet de toilette. Ce qu’on appelle alors poudrier n’est qu’un contenant en carton qui sert avant tout à aller acheter de la poudre en vrac. Au début du XXe siècle, l’esthétique et les matériaux du poudrier évoluent pour arriver au summum de la modernité du moment grâce au savoir-faire de la joaillerie. Les premiers poudriers Art nouveau en métal apparaissent. Ils abritent une palette de couleurs, parfois complétée par un miroir et des accessoires, allant de la houppette à poudre aux pinceaux. Objets de luxe, ils se déclinent à l’infini et peuvent être décorés de pierres précieuses, de nacre ou de laque. Avec l’avènement du maquillage industriel suivront les modèles en plastique permettant une diffusion de masse. Cette production en série est le reflet de l’évolution sociétale, tant dans l’évolution des mœurs que dans l’émancipation féminine. Glissé dans un sac à main, le poudrier accompagne la femme moderne. Le maquillage devient un geste d’affirmation.
Sylvie Fleury présente en 2018 l’exposition Palettes of Shadows dans l’espace parisien de la galerie Thaddeus Roppac. L’artiste suisse est connue pour sa pratique pluridisciplinaire revisitant l’histoire de l’art sous un prisme pop. Résolument postmoderne dans ses appropriations, elle combine mode, industrie du luxe et art contemporain pour mieux déboulonner les stéréotypes de genre, explorant autant la culture du shopping que l’univers mécanique de l’automobile. De fait, elle détourne le concept de tuning et l’applique à ses productions, n’hésitant pas à jouer avec les peintures métallisées, les fourrures ou les motifs de flamme.
Jubilatoire, son art fait de la séduction une arme politique.

Sylvie Fleury, Road Movie, 2018. Peinture acrylique sur toile sur bois, 12 kgs. 120 × 120 × 11 cm. Avec l’aimable autorisation de la Galerie Thaddaeus Ropac, Paris. Photo: Charles Duprat © Sylvie Fleury

Sylvie Fleury, Bronzed SPF 30, 2018. Peinture acrylique sur toile sur bois, 10 kgs. 125 × 125 × 6 cm. Avec l’aimable autorisation de la Galerie Thaddaeus Ropac, Paris. Photo: Charles Duprat © Sylvie Fleury

Sylvie Fleury, Couture Palette-Ballets Russes, 2018. Peinture acrylique sur toile sur bois, 10 kgs. 143 × 106 × 6 cm. Avec l’aimable autorisation de la Galerie Thaddaeus Ropac, Paris. Photo: Charles Duprat © Sylvie Fleury

Sylvie Fleury, Pink Explosion, 2018. Peinture acrylique sur toile sur bois, 15 kgs. 120 × 120 × 12,2 cm. Avec l’aimable autorisation de la Galerie Thaddaeus Ropac, Paris. Photo: Charles Duprat © Sylvie Fleury